Evaluation du bloc sciatique + infiltration WALANT pour la réparation de la rupture du tendon d'achille
Position du problème et objectif(s) de l’étude
L’anesthésie pour une réparation chirurgicale d’une rupture du tendon d’Achille présente 3 contraintes : la position de l’opéré en décubitus ventral, la nécessité de recourir à un garrot pneumatique en cuisse et l’existence d’une innervation fluctuante de l’abord cutané par le nerf postérieur de cuisse (nCPC). Différentes techniques anesthésiques sont décrites : anesthésie générale (AG) avec intubation oro-trachéale, rachianesthésie (RA) en décubitus ventral ou anesthésie locorégionale (ALR) proximale des plexus sacrés et lombaires incluant le nCPC. Le but de cette étude est d'évaluer la faisabilité de l'association d’un bloc sciatique proximal (sous-glutéal ou poplité) et d’une infiltration de lidocaïne adrénalinée sur le site chirurgical, inspirée des techniques de WALANT (Wide Awake Local Anesthesia No Tourniquet) afin de simplifier l’approche anesthésique sans garrot (figure 1).
Matériel et méthodes
Les patients adultes, opérés d’une rupture du tendon d'Achille, entre le 01/01/2022 et le 01/04/2023, ont été inclus dans cette étude prospective de soins courants. Une autorisation du comité d'éthique de la SFAR a été obtenue (IRB 00010254 ‐ 2023 – 020). Le bloc sciatique et l'infiltration "WALANT" étaient réalisés sous échoguidage, patient en décubitus ventral. Pour le bloc sciatique, 15 ml de Ropivacaïne 0,375% étaient injectés et pour la WALANT, 30 ml de lidocaïne 1% adrénalinée (Aguettant®) étaient diffusés de part et d’autre du tendon d’Achille au moins 30 minutes avant l’incision. Le critère principal de l’étude était l’efficacité du bloc sciatique + WALANT évalué par la qualité du garrot chimique (absence de recours à un garrot pneumatique) et la qualité de l’anesthésie (recours à une sédation ou une AG). La douleur post-opératoire à J0 (Échelle Numérique 0-10), les durées opératoires et de séjour en SSPI étaient relevés. Seules des statistiques descriptives ont été réalisées, les variables qualitatives étant exprimées en nombre et pourcentages, les variables quantitatives en médiane et interquartiles.
Résultats & Discussion
Trente-neuf patients ont été analysés. L'âge médian était de 40 ans [34, 47]; 35 patients (90%) étaient de sexe masculin et 30 (77%) étaient ASA 1. Tous les patients ont eu une infiltration de type WALANT, 39 patients (87%) ont eu un bloc sciatique, poplité (n=33) ou sous glutéal (n=6). Un bloc fémoral a été associé chez 5 patients, leur chirurgien requérant d’emblée un garrot de cuisse. Aucun garrot n’a été gonflé durant l’intervention à la suite d’un saignement. Quatre patients ont nécessité une sédation per opératoire : 3 pour anxiolyse et 1 pour échec de technique avec douleur ressentie, dûe à une technique de réparation percutanée effectuée au-dessus de la zone d'infiltration. Le temps d'occupation de salle était de 52 [47-62] minutes. Trente-cinq patients (90%) ont shunté la Salle de Soins post interventionnelle (SSPI). Le temps de séjour en SSPI était de 46 [30-59] minutes (n=4). La douleur post-opératoire médiane à J0 était de 0 sur 10 [0, 0]. Seule une douleur au point d'injection de la WALANT a été signalée à J1.
Conclusion
L’association de la WALANT à un bloc sciatique offre une anesthésie satisfaisante pour la suture du tendon d’Achille. Elle permet de s’affranchir du garrot pneumatique, de limiter le risque de douleur sur le territoire du nCPC et de simplifier le parcours patient, évitant le passage en SSPI. Cette approche devra être comparée aux autres techniques anesthésiques pour en confirmer le bénéfice potentiel.
Auteurs
F. Le Sache, S. Bloc, D. Barouk, M. Bucciero, G. Dufour, C. Quemeneur