eNAPaR : Efficacité et sécurité de l’aprotinine en chirurgie cardiaque : comparaison entre deux schémas posologiques distincts
Position du problème et objectif(s) de l’étude
Après un retrait en 2007, l'Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) de l'aprotinine a été rétablie par l'Agence européenne du médicament avec une indication restreinte (pontage aorto-coronarien isolé, iCABG) et l’obligation d’enregistrer le profil d'utilisation de l'aprotinine dans un registre de sécurité (NAPaR) (1). Malgré une utilisation hors AMM majoritaire, le registre s’est achevé sans aucun signal de sécurité (2). Deux régimes de doses d'aprotinine ont été utilisés : la pleine dose (FD) et la demi-dose (HD). L'objectif était de comparer l'efficacité et la sécurité de chaque régime de dose en chirurgie cardiaque sous circulation extra-corporelle.
Matériel et méthodes
Entre février 2016 et août 2022, 9 pays européens ont inclus 6 730 patients adultes traités par l'aprotinine dans le NAPaR. Ce registre a été réalisé en conformité avec la réglementation des pays participants (en France, le CPP Ouest V a donné son accord pour une RIPH3 basée sur la non-opposition des patients). Pour comparer la balance bénéfice/risque des 2 régimes de doses, réduire les biais et équilibrer les 2 groupes, un score de propension (SP) a été construit sur la base des caractéristiques préopératoires des patients. Ensuite, une régression avec pondération inverse sur le SP (IPTW) a été réalisée. Le critère de jugement principal était l’efficacité : taux de réopération pour hémorragie ou tamponnade. La mortalité hospitalière, les événements cardiovasculaires et cérébraux indésirables majeurs (MACCE) et l’insuffisance rénale (KDIGO à 24h) ont été évalués comme critères de tolérance.
Résultats & Discussion
Après exclusion des patients présentant des données manquantes, 5 359 patients ont été inclus dans le SP. Le taux de réopération est significativement réduit dans le groupe FD d’aprotinine vs. HD, tandis que l’incidence d’insuffisance rénale aigüe a légèrement augmenté (tableau 1). Aucune différence n'a été constatée sur la mortalité et le MACCE.
Conclusion
Dans le eNAPaR, la dose complète d'aprotinine a été associée à une diminution des réopérations pour hémorragie, au prix d'une légère majoration de l’incidence de dysfonction rénale, sans autres signaux sur la sécurité. Un essai randomisé multicentrique serait nécessaire pour consolider ces résultats.
Auteurs
S. Provenchère (1), B. Rozec (2), P. Colson (3), M. Sénard (4), B. Gaudriot (5), B. Cholley (6), A. Ouattara (7), P. Mauriat (7), J.L. Fellahi (8)