Induction de l'anesthésie générale en pédiatrie, évaluation des pratiques avant suppression du protoxyde d'azote mural
Position du problème et objectif(s) de l’étude
Le protoxyde d’azote (N2O), premier gaz historique de la pharmacopée anesthésique, est un puissant gaz à effet de serre et destructeur de la couche d’ozone. Il est pourtant encore utilisé en anesthésie pédiatrique pour l’anxiolyse et l’analgésie. Dans la perspective de suppression du N2O via les cadres muraux au niveau de l’hôpital, nous avons étudié l’utilisation de ce médicament au sein de notre bloc opératoire, et les conséquences ressenties par l’équipe d’anesthésie.
Matériel et méthodes
Nous avons mené une étude observationnelle prospective monocentrique, au sein de notre bloc opératoire d’activité pédiatrique exclusive, de novembre 2022 à février 2023. Cette étude a été approuvée par le Comité d’Ethique de la SFAR (IRB 00010254‐2022-128). L’information aux patients et leurs parents était délivrée sur des affiches installées en salle d’accueil du bloc. Nous avons inclus les patients mineurs, bénéficiant d’un acte avec intervention de l’équipe d’anesthésie (chirurgie programmée ou urgente, radiologie interventionnelle, examen radiologique, séance de radiothérapie, mise en place d’un abord veineux). Les patients déjà intubés à l’arrivée au bloc n’étaient pas inclus. Un formulaire était rempli pour chaque patient, à l’entrée en salle d’intervention par l’équipe anesthésique et opératoire. Il concernait les caractéristiques générales et anesthésiques du patient, le type d’intervention, les modalités d’induction (inhalée, intraveineuse, utilisation ou non du N2O), l’existence de prémédication, d’une anxiété du patient et son intensité, en utilisant le score de Yale modifié, la satisfaction du praticien quant à l’induction.
Résultats & Discussion
Au cours de l’étude, 748 ont été admis au bloc pédiatrique au cours de l’étude et 245 patients ont été inclus. Cinquante pour cent des patients étaient ASA 1 et 28% porteurs d’une maladie chronique. Il y avait 90% de patients à jeun, et 20% reçevaient une prémédication médicamenteuse. Un tiers des patients (28%) étaient déjà perfusés à l’arrivée au bloc. Trente et un pour cent des patients reçevaient du protoxyde d’azote: 50% au cours d’induction IV, 50% au cours d’induction inhalée. Le N2O était utilisé en moyenne 5 min à l’induction et jamais en entretien, avec une fraction inspirée de 50% et un débit de gaz frais de 10 L/min. L’anxiété médiane à l’induction était de 6/18 dans le groupe N2O comme dans le groupe sans N2O. La satisfaction médiane du praticien était de 10/10 et ne différait pas entre les deux groupes. Notre inclusion s’étant déroulée en période d’épidémie de bronchiolite, nous avons dû prolonger la période de recueil suite à la mise en place d’un plan blanc. La faible utilisation du N2O peut être expliquée par une équipe anesthésique jeune, sensibilisée à l’écoconception des soins. Les praticiens étaient informés du retrait des cadres de N2O à venir, et avaient peut-être déjà commencé à modifier leurs pratiques.
Conclusion
Dans notre étude, l’utilisation ou non du N2O n’était pas associée à une différence d’anxiété chez les patients, ni une modification du ressenti des praticiens quant à la qualité de l’induction, qu’elle soit inhalée ou intraveineuse.
Auteurs
J. Fabry Terrasse, C. Allary, F. Michel