Mieux évaluer l’exposition prénatale au cannabis : comparaison entre l’auto-déclaration et les biomarqueurs urinaires et plasmatiques
Contenu du résumé
Introduction: Depuis la légalisation du cannabis au Canada, sa consommation chez les femmes enceintes est en hausse, touchant près de 5 % des grossesses en 2021 (1). Or, l’exposition in utero est associée à divers risques périnataux, incluant le retard de croissance intra-utérin, la prématurité et des atteintes neurodéveloppementales (2,3). Cependant, les résultats des études demeurent contradictoires, en raison d’un biais de classification lié à l’absence d’outil fiable pour mesurer l’exposition réelle au cannabis (3-6). Objectifs: Évaluer l’accord entre la consommation de cannabis auto-déclarée et la détection de 18 phytocannabinoïdes urinaires et plasmatiques pendant la grossesse. Examiner l’association entre la fréquence de consommation et les concentrations mesurées. Méthodes: Cette étude inclut 121 femmes enceintes issues d’une cohorte prospective. Des questionnaires électroniques mensuels auto-administrés ont documenté la consommation de cannabis tout au long de la grossesse. Trois échantillons d’urine (un par trimestre) et un échantillon de plasma (3e trimestre) ont été analysés par chromatographie en phase liquide couplée à la spectrométrie de masse en tandem pour détecter 18 phytocannabinoïdes. L’accord a été évalué par le kappa de Cohen, et des régressions linéaires multivariées (modèles à mesures répétées pour l’urine) ont mesuré l’effet de la fréquence de consommation sur les concentrations (α=0,05). Toutes les participantes ont fourni un consentement éclairé, et l’étude a été approuvée par un comité d’éthique. Conclusion: L’auto-déclaration présente un accord substantiel avec la détection urinaire d’au moins un phytocannabinoïde (κ=0,78) et presque parfait avec le plasma (κ=0,82). Chaque jour additionnel de consommation mensuelle est associé à une hausse significative des concentrations urinaires (THC-COOH, THC-COOH-glucuronide, Δ9-THC-glucuronide, CBD) et plasmatiques (THC-COOH, THC-COOH-glucuronide, Δ9-THC, 11-OH-THC) (p<0,05). Ces résultats soutiennent l’utilisation de l’auto-déclaration comme outil de mesure fiable, peu invasif et cliniquement pertinent pour évaluer l’exposition prénatale au cannabis. Ils soulignent aussi l’importance de documenter la fréquence de consommation, un facteur déterminant du niveau d’exposition in utero.
Liste des auteurs et affiliations
V. Verdant (1), V. Gillet (2), V. Bouchard (3), L. Haroune (4), S. Lemaire-Paquette (5), J.P. Baillargeon (6), A. Ouellet (3)
(1) Faculté De Médecine Et Des Sciences De La Santé, Université De Sherbrooke, Sherbrooke, Canada, (2) Faculté De Médecine Et Des Sciences De La Santé, Université De Sherbrooke (département De Pédiatrie), Sherbrooke, Canada, (3) Faculté De Médecine Et Des Sciences De La Santé, Université De Sherbrooke (département D'obstétrique Et Gynécologie), Sherbrooke, Canada, (4) Faculté De Médecine Et Des Sciences De La Santé, Université De Sherbrooke (département De Pharmacologie-Physiologie), Sherbrooke, Canada, (5) Centre Intégré Universitaire De Santé Et De Services Sociaux De L'estrie-Centre Hospitalier Universitaire De Sherbrooke, Sherbrooke, Canada, (6) Faculté De Médecine Et Des Sciences De La Santé, Université De Sherbrooke (département De Médecine), Sherbrooke, Canada