17 septembre 2025
315

Où doit-on hospitaliser les patients après une anaphylaxie périopératoire, une étude rétrospective monocentrique

Position du problème et objectif(s) de l’étude

La survenue d’une anaphylaxie périopératoire impose une surveillance postopératoire adaptée à la gravité de l’événement. Toutefois, les critères objectifs guidant l’admission en soins intensifs restent mal définis. Les recommandations récentes de la SFAR 2025 reposent sur des avis d’experts. L’objectif était d’identifier les facteurs associés à la survenue de séquelles après un choc anaphylactique sous anesthésie générale, d’évaluer si la dose d’adrénaline pouvait aider à décider d’une hospitalisation en soins intensifs, et de comparer les patients hospitalisés à ceux surveillés en secteur conventionnel.

Matériel et méthodes

Nous avons réalisé une étude rétrospective monocentrique incluant les patients adultes ayant présenté une suspicion d’anaphylaxie périopératoire sévère entre 2012 et 2023, période au cours de laquelle 627 082 anesthésies générales ou sédations ont été réalisées. L’inclusion reposait sur un dosage de tryptase dans les 72h suivant une anesthésie générale, l’administration peropératoire de noradrénaline ou d’adrénaline, et un score HCSS (Hypersensitivity Clinical Scoring Scheme) strictement supérieur à 10. Le critère de jugement principal était la survenue de séquelles à 30 jours. La valeur seuil discriminante de la dose d’adrénaline a été évaluée par une analyse ROC. Les facteurs associés à la survenue de séquelles ont été explorés en analyse univariée. Les comparaisons entre hospitalisés en soins intensifs et patients surveillés en secteur conventionnel ont été réalisées par tests du χ², exact de Fisher ou Wilcoxon selon le type de variable. Les données provenaient d’INCLUDE (INtegration Center of the Lille University hospital for Data Exploration)(avis éthique favorable n°2024-19-04-V-03), autorisé par la CNIL (n°1754053). Le projet a été enregistré auprès du Délégué à la Protection des Données et déclaré sous la référence DEC24-011.

Résultats & Discussion

Au total, 183 patients présentant une anaphylaxie périopératoire ont été inclus. Les allergènes les plus suspectés étaient les curares (73,2 %) et les antibiotiques (19,1 %). La morbidité à 30 jours concernait 20,2 % des patients, recevant des doses d’adrénaline plus élevées (médiane : 300 µg vs 100 µg ; p=0,038). 69,4 % des patients ont été admis en soins intensifs et 30,6 % surveillés en service conventionnel. Un seuil de 400 µg semblait marquer une valeur seuil au-delà de laquelle les complications devenaient plus fréquentes. En dessous, les complications étaient rares, notamment chez les patients surveillés hors soins intensifs. Le sexe féminin, un remplissage supérieur à 20 mL/kg et un IMC inférieur à 30 étaient associés à la survenue de séquelles, sans association retrouvée avec les antécédents médicaux. Le score HCSS initial n’était pas discriminant. Aucun des 56 patients non hospitalisés en soins intensifs n’a présenté de complication, suggérant que la décision du clinicien a été globalement adaptée.

Conclusion

Dans cette cohorte, une dose totale d’adrénaline supérieure à 400 µg semblait associée à un risque accru de séquelles à 30 jours, suggérant qu’une hospitalisation en soins intensifs pourrait être recommandée au-delà de ce seuil. L’absence de complication chez les patients surveillés en SSPI sans transfert en réanimation suggère que l’appréciation clinique initiale était pertinente. Ces résultats doivent être confirmés par de futures évaluations multicentriques.

Auteurs

Antoine LUONG (1), Damien ROUSSELEAU (1) , Alexandre BOURGEOIS (1), Cédric CIRENEI (1), Charlotte FERRAN (2), Gilles LEBUFFE (2) - (1)Linique D’anesthésie Réanimation Et De La Douleur, Hôpital Huriez, Chu De Lille, 59037 Lille Cedex, Lille, France, (2)Include Entrepot De Données, Chu Lille, 59000 D’anesthésie Réanimation Et De La Douleur, Hôpital Huriez, Chu De Lille, 59037 Lille Cedex, Lille, France

Orateur(s)