L’expérience de l’anesthésie en vie réelle : résultats de la cohorte AnéSKEZI
Position du problème et objectif(s) de l’étude
Environ 11 millions d’anesthésies (générales (AG), loco-régionales (ALR) ou locales) sont recensées par an en France (1). L’anesthésie constitue un acte de soin courant auquel la majorité des individus sera confrontée tandis qu’il est loin d’être anodin (2). À ce jour, il n’existe que très peu de données de vie réelle sur le vécu des patients envers l’acte anesthésique. Recueillir les attentes et perceptions des patient(e)s pourrait être particulièrement important pour proposer des améliorations de l’offre de soins. L’objectif principal de l’étude était de décrire l’expérience vécue des patients et évaluer leur satisfaction envers l’acte anesthésique en France. Nous présentons les résultats de la première analyse intermédiaire.
Matériel et méthodes
Une étude transversale a été conduite à partir des données de la cohorte ancillaire AnéSKEZI. Le recrutement a eu lieu à partir de la e-cohorte SKETHIS par les réseaux sociaux et après diffusion par la SFAR. Les participants devaient être majeurs et accepter de participer à la e-cohorte. Ils devaient ensuite remplir un questionnaire en ligne retraçant les informations des anesthésies vécues au cours des cinq dernières années. Afin de prendre en compte la multiplicité potentielle des anesthésies pour un même patient, une pondération a été appliquée lors des analyses croisées, correspondant à l’inverse du nombre total d’anesthésies par patient (1/n). La satisfaction vis-à-vis de l’acte anesthésique a été évaluée à l’aide d’échelles de Likert allant de 0 (pas du tout satisfait(e)) à 10 (totalement satisfait(e)).
Résultats & Discussion
Au total, 129 participant(e)s ont répondu au questionnaire, dont 85 ont déclaré avoir vécu au moins une anesthésie au cours des cinq dernières années. Ces 85 participant(e)s ont rapporté un total de 143 anesthésies. Parmi eux, 75% étaient des femmes et l’âge moyen±ET était de 44±14 ans. Près de la moitié (45%) des anesthésies ont été réalisées dans un établissement public, 60% étaient une AG, 58% avaient été réalisées dans un but chirurgical et 25% ont nécessité une hospitalisation de plus d’un jour. Des effets secondaires postopératoires ont été rapportés pour 27% des anesthésies, le plus fréquent étant la fatigue (25%). L’acte anesthésique a été jugé satisfaisant dans la majorité des cas, avec une note moyenne±ET de 8±3. La satisfaction ne variait pas selon le type d’établissement ni selon le type d’anesthésie. Elle était toutefois plus élevée pour les anesthésies réalisées dans un contexte de diagnostic ou de dépistage (9,5±1,4 en moyenne) que pour celles liées à une intervention chirurgicale (7,9±2,5, p<0,001), plus élevée chez les hommes (8,5±2,1) que chez les femmes (8,1±2,4, p<0.001) et significativement (p<0.001) plus basse en cas de présence d’un effet secondaire lié à l’anesthésie (5,9±2,8) qu’en son absence (8,8±1,8).
Conclusion
Les patient(e)s interrogé(e)s expriment un niveau de satisfaction vis-à-vis de l’acte anesthésique élevé. Cette satisfaction est cependant moins bonne chez les femmes, lorsque l’anesthésie est réalisée pour un acte chirurgical et lorsque l’anesthésie est associée à au moins un effet secondaire après l’acte. L’analyse (en cours) des verbatims recueillis par les patient(e)s permettra de préciser des pistes d’amélioration et leurs attentes. Une étude prospective (en cours), menée au plus près de la période péri-anesthésique, permettra de recueillir une expérience plus précise de l’anesthésie et de mieux évaluer les soins délivrés actuellement.
Auteurs
Jessica SOYER, Inesse BOUINANE, Akram HECINI, Jean-Philippe BERTOCCHIO - (1)Skezi, Annecy, France