17 septembre 2025
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Impact d’une antibioprophylaxie précoce sur le développement des pneumonies acquises sous ventilations mécaniques (PAVM) chez les patients traumatisés

Position du problème et objectif(s) de l’étude

La PAVM touche près de 36% (1) des patients traumatisés sévères, et reste associée à une morbi-mortalité accrue. L’administration d’une antibioprophylaxie systémique précoce dans le cadre d’une indication recommandée, fréquente chez le patient traumatisé, pourrait avoir une incidence sur le risque de PAVM (2,3). L’objectif de l’étude était d’évaluer l’association entre une antibioprophylaxie précoce de courte durée chez le patient traumatisé et le risque de survenue de PAVM.

Matériel et méthodes

Il s’agit d’une étude de cohorte rétrospective, monocentrique, conduite chez des patients majeurs, admis pour suspicion de traumatisme sévère, et ayant nécessité le recours à la ventilation mécanique, pour une durée minimale de 48h. Les données démographiques et cliniques sont issues du registre Traumabase ®. Le recueil de données complémentaires concernant les modalités de l’antibioprophylaxie a été réalisé. Une antibioprophylaxie était définie par l’administration d’une antibioprophylaxie lors de la phase préhospitalière et / ou hospitalière, débutée dans les 24 premières heures, pour une durée maximale de 5 jours. Le diagnostic rétrospectif de PAVM était défini par l’association d’une suspicion clinique, d’un prélèvement microbiologique respiratoire positif et de l’instauration d’une antibiothérapie. Le critère de jugement principal était la survenue d’un épisode de PAVM, évalué à J28. L’analyse a été réalisé grâce à un score de propension par méthode de pondération par l’inverse de la probabilité de traitement (IPTW). Le seuil de significativité était fixé pour p < 0,05. Cette étude a été réalisé après accord du CER Paris Nord (IRB : 00006477).

Résultats & Discussion

Entre le 01/01/2021 et le 31/12/2023, 312 patients traumatisés ont été inclus. Une antibioprophylaxie était administrée chez 60,9 % des patients. Les fractures osseuses ouvertes (34,5%) et la suspicion de pneumonie d’inhalation (30,2%) représentaient les indications principales. Le principal antibiotique utilisé était l’association amoxicilline-acide clavulanique (94,3%), pour une durée moyenne de 3,5 jours. Cent soixante dix patients (54%) ont développé un épisode de PAVM, dont 119 (70,8%) un épisode précoce (< 7 jours). S.aureus était le germe le plus représenté (42,4%) et 60,6% des prélèvements microbiologiques mettaient en évidence une étiologie polymicrobienne. L’incidence de PAVM était significativement plus faible chez les patients ayant reçu une antibioprophylaxie (45,3% vs 68,9%, average treatment effect 0.82 [0.73, 0.92] ; p = 0,0012). L’administration d’une antibioprophylaxie ne modifiait ni l’incidence de PAVM précoce, ni la durée de ventilation mécanique, ni la durée d’hospitalisation, ni la mortalité à J30 (Cf Table). L’exposition à une antibioprophylaxie n’augmentait pas le risque d’acquisition de bactéries multirésistantes (BMR).

Conclusion

Lors de la prise en charge initiale d’un patient traumatisé nécessitant le recours à la ventilation mécanique, l’instauration d’une antibioprophylaxie précoce était associée à une réduction de l’incidence de PAVM, sans retentissement sur la durée de ventilation mécanique et la mortalité. Le risque d’émergence de bactéries multirésistantes ne semblait pas majoré. La survenue de PAVM étant associée à une morbi-mortalité importante, l’instauration d’une antibioprophylaxie systématique chez les patients traumatisés ventilés pourrait améliorer leur pronostic. Des études randomisées à plus grande échelles sont nécessaires pour confirmer l’intérêt d’une telle pratique.

Auteurs

Johan MUCHARDT (1) , Lien HAN (2), Aline-Marie FLORENCE (2), Caroline JEANTRELLE (1), Myriam LAMAMRI (1), Emmanuel WEISS (1), Arnaud FOUCRIER (1) - (1)Hopital Beaujon, Clichy, France, (2)Hopital Bichat, Paris, France

Orateur(s)

Johan MUCHARDT  (Clichy)