Surveillance des infections du site opératoire après chirurgie pour cancer du sein : impact potentiel des nouvelles recommandations sur l’antibioprophylaxie
Position du problème et objectif(s) de l’étude
Les infections du site opératoire (ISO) après chirurgie pour cancer du sein (CCS) ont des conséquences redoutables : risque du sepsis, conséquences esthétiques et retard des traitements complémentaires. Appliquant les nouvelles nouvelles recommandations formalisées d'expert (RFE) sur l’antibioprophylaxie (ATBP) à partir de janvier 2024 (1), l’ATBP n’est plus indiquée pour les tumorectomies avec ganglion sentinelle (TGS). A la suite de l’enquête SPICMI (Surveillance et Prévention du Risque Infectieux en Chirurgie et Médecine Interventionnelle) 2024, une recrudescence des ISO en CCS dans notre établissement a conduit à étudier les facteurs ayant pu contribuer à cette augmentation, en ciblant particulièrement l’ATBP.
Matériel et méthodes
L’équipe opérationnelle d’Hygiène (EOH) a identifié 80 dossiers de patientes opérées en 2024, ayant présenté une ISO après CCS. Ces dossiers sont comparés à ceux de patientes opérées pendant la même période, à partir d’une cohorte issue de la base de données anesthésique qui les recueillent en vie réelle (Centricity Anesthesia General Electric). Les variables prises en compte sont l’âge, l’index de masse corporelle, le type et la durée de chirurgie, la réalisation d’une ATBP, sa dose, le moment de son injection (avant ou après l’incision) mais également la température du patient à l’arrivée en salle de réveil. L’administration d’ATBP et la température à l'arrivée en SSPI ont été colligées sur 5 ans. Cette démarche qualité, commanditée par l’institution n’a pas nécessité d’accord du comité d’éthique.
Résultats & Discussion
Nous avons analysé une cohorte de 10395 interventions sur 5 ans depuis 2024. On remarque une diminution du pourcentage des TGS qui reçoivent une ATBP, suivant la mise à jour des RFE en 2024 (Figure 1). La température à l’arrivée en SSPI est restée stable de 2020 à 2024. Pour l'étude entre les cas (n=80) et la cohorte de la même période en 2024 (n= 2455) , les caractéristiques démographiques des deux groupes sont similaires, mais les cas présentent une prévalence plus élevée d’obésité (Tableau 1). ATBP varie selon le type d’intervention, mais reste cohérente entre cas et cohorte. Le % de patients ayant reçu une ATBP pour TGS s’est effondré en 2024. La durée d’intervention est plus longue dans les cas et dépasse 2 heures (74% des cas vs 54% dans la cohorte). La durée allongée de chirurgie des cas pourrait être liée à l’association plus fréquente d’un geste de plastie, sans ATBP. En complément, les tumorectomies ont une durée de plus de deux heures, (76% de cas vs 52% dans la cohorte). La limitation actuelle de ce travail réside dans l’absence d’analyse statistique qui est en cours de réalisation.
Conclusion
Une diminution de l’administration d’ATBP a été observée, conformément aux attentes à la suite de la publication de la RFE. A la suite de cette enquête, les actions d’amélioration devraient porter sur la nécessité de tenir compte du surpoids et de l’augmentation de la durée de chirurgie liée aux gestes associés de plastie qui allongent la durée de chirurgie au-delà de 2 heures. En accord avec un premier retour de la SFAR faisant suite à la RFE (2), la littérature est insuffisante à ce jour pour l’ATBP de certains actes de chirurgie. Ces premières données récentes peuvent contribuer à mieux cibler certains actes en (CCS).
Auteurs
Alexandra VOICU (1) , Jean-Louis BOURGAIN (1), Najet OURDJINI (2), Philippe SITBON (1) - (1)Daci, Service D'anesthésie, Gustave Roussy, Villejuif, France, (2)Equipe Opérationnelle D'hygiène, Gustave Roussy, Villejuif, France