17 septembre 2025
212-213

Amélioration de la prise en charge analgésique en chirurgie orthognatique : apport du bloc V2/V3 dans une stratégie "Opioid Sparing Anesthesia" (OSA)°

Position du problème et objectif(s) de l’étude

L’ostéotomie maxillo-mandibulaire (OMM), s’intègre dans des parcours de soins optimisés fondés sur la Réhabilitation Améliorée Après Chirurgie (RAAC) dont l’un des piliers est la réduction du recours aux morphiniques. Dans ce cadre, des stratégies d’anesthésie innovantes telle que l’Opioid-Sparing Anesthesia (OSA) ont émergé comme des alternatives efficaces à l’anesthésie conventionnelle. Cette dernière a suscité un intérêt croissant porté par l’apparition de nouvelles études suggérant qu’elle pourrait représenter un meilleur compromis entre efficacité analgésique et minimisation des effets indésirables liés aux opioïdes. Ainsi la réalisation d’une anesthésie locorégionale avec un bloc bilatéral du nerf maxillaire (V2) et du nerf mandibulaire (V3) constitue une solution intéressante pour favoriser le contrôle optimal de la douleur, mais aussi une réduction des effets indésirables liés aux opioïdes, favorisant ainsi une récupération plus rapide. L’objectif de cette étude est d’évaluer l’impact d’une stratégie OSA sur la qualité de l’analgésie post-opératoire immédiate, par comparaison à une stratégie conventionnelle.

Matériel et méthodes

Etude rétrospective monocentrique incluant les patients majeurs ayant bénéficié d’une ostéotomie maxillo-mandibulaire sur l’année 2019. Une demande d’avis a été soumise au Comité d’éthique pour la recherche en anesthésie-réanimation (CERAR), qui a émis un avis favorable (IRB 00010254 ‐ 2024 – 111). Deux groupes ont été comparés : un groupe « OSA », ayant reçu une stratégie d’épargne morphinique incluant un bloc bilatéral V2/V3 associé à une analgésie multimodale, et un groupe « SC » (stratégie conventionnelle), ayant reçu une anesthésie générale standard reposant principalement sur les morphiniques. Les données ont été extraites des dossiers médicaux, des feuilles d’anesthésie et de SSPI. Le critère de jugement principal était la douleur post-opératoire précoce, évaluée par l’aire sous la courbe des scores EVA évaluées à H1/2, H1et H2 (correspondant au temps passé en SSPI). Les critères secondaires incluaient la consommation per-opératoire de sufentanil, les EVA à H6–H8, H12–H16 et H20–H24, ainsi que le temps passé en SSPI. L’analyse statistique a été réalisée à l’aide des tests de Mann-Whitney et de Fisher. Un seuil de p < 0,05 était considéré comme significatif.

Résultats & Discussion

91 patients ont été inclus : 43 dans le groupe OSA, 48 dans le groupe SC. Les groupes étaient comparables. Seul l’âge médian était plus élevé dans le groupe OSA (37 ans contre 28,5 ans dans le groupe SC, p = 0,004). Une réduction significative de la douleur est observée en post opératoire immédiate dans le groupe OSA (AUC (EVA H1/2 à H2) 1,24 vs 2,1 ; p = 0,011) malgré une consommation per-opératoire de sufentanil significativement réduite (36,7 µg vs 44,2 µg, p = 0,012). Le temps moyen passé en SSPI était significativement plus court dans le groupe OSA (1,91 h vs 2,46 h ; p = 0,001). A la sortie du SSPI une tendance à une diminution de la douleur persistait jusqu'à H24.

Conclusion

La stratégie d’Opioid-Sparing Anesthesia (OSA), incluant la réalisation d’un bloc bilatéral V2/V3, a permis de réduire la douleur dans les premières heures post-opératoires. Ces résultats suggèrent que l’intégration du bloc V2/V3 dans une approche multimodale pourrait optimiser la récupération en chirurgie orthognathique, en s’inscrivant dans les objectifs d’une prise en charge RAAC. Des études prospectives restent nécessaires pour confirmer ces bénéfices et en évaluer l’impact à plus long terme.

Auteurs

Nicolas LAVILLE, Vincent DEGOS, Alice JACQUENS - (1)Service D'anesthésie Réanimation Neurochirurgicale, Hôpital De La Pitié Salpétrière, Paris, France

Orateur(s)

Nicolas LAVILLE  (Paris)