Intérêt du TEG6S pour la réduction des besoins transfusionnels au cours des HPP : INTEGRAL-HPP
Position du problème et objectif(s) de l’étude
L’hémorragie du post-partum (HPP) est une complication grave et fréquente de l’accouchement. Elle peut s’accompagner de troubles de l’hémostase, en particulier d’une hypofibrinogénémie, dont la présence est associée à une morbi-mortalité accrue. Il est indispensable d’identifier et de traiter ces anomalies précocement. Le diagnostic biologique standard en laboratoire est souvent retardé, conduisant à l’administration empirique de fibrinogène dans les HPP sévères, avant même d’avoir authentifié la présence ou non d’une coagulopathie. Le TEG6S® est permet d’explorer précisément la coagulation sur sang total en quelques minutes. Les anomalies détectées par le TEG6S® sont fortement corrélées à celles en biologie standard, permettant de guider rapidement la stratégie transfusionnelle de manière efficiente. Notre maternité francilienne de niveau III s’est équipée en octobre 2023 d’un TEG6S®, après un an de démarche. Nous avons souhaité évaluer localement l’impact de ce dispositif sur la consommation en fibrinogène dans le cadre de la prise en charge des HPP sévères (>1L).
Matériel et méthodes
Il s’agissait d’une étude rétrospective monocentrique. Les dossiers de toutes les patientes ayant accouché dans notre maternité et ayant présenté une HPP >1 L sur une période d’un an avant l’installation du TEG6S® ont été analysés et comparés à ceux de toutes les patientes ayant accouché et ayant présenté une HPP >1L au cours de l’année calendaire suivant l’installation du dispositif. L’objectif principal était de comparer la consommation de fibrinogène avant et après l’installation du TEG6S®. Les objectifs secondaires portaient sur la morbi-mortalité associée à l’HPP.
Résultats & Discussion
108 patientes ont été identifiées sur la période d’un an avant l’installation du TEG6S®, et 87 patientes au cours de l’année suivant l’installation du dispositif. Sur la période d’un an avant l’installation du TEG, 16/108 patientes (15%) ont reçu au moins 1g de fibrinogène au cours de la prise en charge de leur HPP, contre 22/87 (25,2%) patientes dans l’année suivant l’installation du TEG. Seulement 5 patientes présentaient une hypofibrinogénémie <2g/L et donc une indication formelle à recevoir du fibrinogène (2 sur la période "avant", 3 sur la période "après"). Parmi 22 patientes de la période « après » ayant reçu du fibrinogène, 19 patientes n’avaient donc pas d’indication théorique à en recevoir. Parmi ces 19 patientes, la majorité (15 patientes/19) n’a pas bénéficié d’un test viscoélastique, ce qui aurait permis de rassurer le clinicien et d’éviter l’utilisation du fibrinogène. Les 4 autres patientes ont bénéficié d’un test viscoélastique, et malgré un résultat normal dans 3 cas sur 4, du fibrinogène a pourtant été administré. Le taux de recours au TEG6S(r) était faible initialement, puis progressivement croissant, pour atteindre un taux d’utilisation globale dans 19,5% des cas de notre population. Aucune différence n’a été mise en évidence entre les périodes avant-après sur la morbi-mortalité liée aux HPP.
Conclusion
L’introduction du TEG6S® n’a pas permis de réduire la consommation en fibrinogène au cours des HPP > 1L dans l’année suivant son installation au sein de notre maternité. La fréquence de recours au dispositif était encore faible dans les mois suivants son installation, mais progressivement croissante sur l’année étudiée, laissant espérer de meilleurs résultats dans un avenir proche. Des actions seront mises en place pour obtenir le bénéfice médico-économique attendu du dispositif.
Auteurs
Arthur RAGOT (1) , Elsa BROCAS (2) - (1)Centre Hospitalier Sud Francilien, Corbeil-Essonne, France, (2)Hôpital Paris-Saclay, Saclay, France