Facteurs prédictifs de dérivation de liquide cérébrospinal dans l’hémorragie sous-arachnoïdienne anévrismale de bas grade
Position du problème et objectif(s) de l’étude
L'hydrocéphalie aiguë est une complication fréquente de l'hémorragie sous-arachnoïdienne anévrismale (HSA) (1). Les dernières recommandations européennes et américaines préconisent une dérivation du liquide cérébrospinal (LCS) en cas d'hydrocéphalie associée à une altération de la conscience (2). Alors que plusieurs paramètres radiologiques sont décrits dans la littérature pour évaluer l’hydrocéphalie, celle-ci est souvent évaluée subjectivement en pratique. L’objectif de cette étude est d’identifier les facteurs prédictifs cliniques et radiologiques à l’admission associés à une dérivation de LCS chez les patients ayant une HSA de bas grade WFNS.
Matériel et méthodes
Il s'agit d'une étude observationnelle rétrospective n’impliquant pas la personne humaine à partir des données collectées dans 3 centres de réanimation neurochirurgicale. La base de données utilisée (Neurobase®), enregistrée sous le numéro CER-2021-77, a été examinée et approuvée par le IRB 00006477. Les patients inclus avaient une HSA anévrismale ou sine materia de grade WFNS 1, 2 ou 3. En plus des caractéristiques cliniques, les imageries réalisées à l’admission ont été étudiées pour déterminer des critères radiologiques d’hydrocéphalie (index bicaudé, dilatation des cornes temporales, taille du 3e ventricule), de saignement intracrânien (score de Hijdra ventriculaire et sous-arachnoïdien, score de Graeb modifié) et d’œdème cérébral (SEBES). Nous avons recherché les facteurs prédictifs de dérivation du LCS en effectuant une analyse univariée puis multivariée de différentes variables cliniques et radiologiques présentes à l’admission des patients en réanimation. Pour éviter la multi-colinéarité, nous avons sélectionné en analyse univariée sur l'AUC les facteurs les plus prédictifs dans la dimension recherchée. L'analyse multivariée a été effectuée sur des variables éventuellement modifiées si celles-ci n'étaient pas log-linéaires. Les propriétés discriminantes et de calibration du modèle multivarié ont été calculées.
Résultats & Discussion
Nous avons inclus 227 patients sur les 3 sites, en majorité des femmes à 60%, de 53 ans d'âge moyen. Il s'agit principalement de grade WFNS 1 à 68%. Des dérivations ont été posées chez 45% des patients, dont 93% de DVE. Elles sont posées pour 92% d'entre elles dans les 2 premiers jours. L’analyse multivariée montrait que les facteurs prédictifs indépendamment associés à la pose d'une dérivation étaient : le délai entre les premiers symptômes et la première imagerie (ORa. 0,68 [0,49 – 0,95]), le score de Glasgow le plus bas des 24 premières heures (ORa. 0,38 [0,22 – 0,64]), le score de Hijdra ventriculaire (ORa. 1,76 [1,35 – 2,28]), la dilatation des cornes temporales (ORa. 2,70 [1,55 – 4,71]), le score SEBES 1 (ORa. 4,49 [1,28 – 15,75]), SEBES 2 (ORa. 6,74 [1,73 – 26,24]), SEBES 3 ou 4 (ORa. 2,41 [0,67 – 8,70]), le centre d’inclusion 2 (ORa. 30,94 [6,05 – 158,34]), et le centre d’inclusion 3 (ORa. 22,03 [4,27 – 113,63]).
Conclusion
Cette étude montre que la décision de réaliser une dérivation de LCS dépend de la sévérité de l'hydrocéphalie et des troubles de conscience, mais aussi de l'œdème cérébral, du délai entre les premiers symptômes et la première imagerie, et de la quantité de sang dans les ventricules. Cette zone grise d’indication à la dérivation est mise en évidence par l’hétérogénéité des pratiques entre les centres inclus.
Auteurs
Marie LEJEUNE (1) , Benjamin CHOUSTERMAN (2), Samy FIGUEIREDO (3), Jonas POCHARD (3), Stéphanie SIGAUT (4), Bertrand MATHON (1), Matthieu LANDART (1), Adam BIARD (1), Léa MEYER (1), Sara VAN PHAN (1), Vincent DEGOS (1), Alice JACQUENS (1), Rémy BERNARD (1), Groupe NEUROBASE® (3) - (1)Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris, France, (2)Hôpital Lariboisière, Paris, France, (3)Hôpital Bicêtre, Kremlin-Bicêtre, France, (4)Hôpital Beaujon, Clichy, France