Association entre les monomères de fibrine à l’admission et la survenue d’une ischémie cérébrale retardée après hémorragie sous-arachnoïdienne d’origine anévrismale : une étude rétrospective monocentrique
Position du problème et objectif(s) de l’étude
L’hémorragie sous-arachnoïdienne (HSA) d’origine anévrismale est un AVC fréquent grevée d’une lourde morbi-mortalité (1). L’une des principales étiologies de la mauvaise évolution est l’ischémie cérébrale retardée (ICR) (2). L’ICR est singulièrement dépendante de la microthrombose locale. Les monomères de fibrine (MF) sont des marqueurs précoces de l’activation de la coagulation car ils sont générés directement par la thrombine. L’intérêt de leur dosage a déjà été prouvé dans de nombreuses situations (3,4). Leur dosage pourrait s’avérer intéressant dans l’exploration de la dysrégulation de l’activité procoagulante. L’objectif principal de l’étude est d’évaluer l’intérêt du dosage des MF à l’admission dans la prédiction de survenue de l’ICR.
Matériel et méthodes
Analyse rétrospective d’une cohorte de patient monocentrique admis de janvier 2022 à décembre 2024. L’étude a été approuvée par le comité d’évaluation éthique de l’Académie de Santé des Armées et est enregistrée sous le numéro IRB00013918. Tous les patients majeurs admis pour une HSA anévrismale confirmée à l’imagerie cérébrale ont été inclus. Les critères d’exclusion étaient le refus du patient et l’absence de dosage des MF. La prise en charge des patients était soumise à un protocole local standardisé, en accord avec les recommandations. Les caractéristiques des patients, l’état clinique, les paramètres paracliniques, la prise en charge, l’évolution hospitalière et à 6 mois (par le questionnaire de GOSE) étaient recueillis de manière prospective. Une analyse univariée puis multivariée par régression logistique ont été utilisées pour étudier l’association entre les MF et l’ICR, la mortalité intra-hospitalière et la mauvaise évolution neurologique à 6 mois (score de GOSE ≤ 4).
Résultats & Discussion
101 patients ont été analysés. La prévalence de l’ICR était de 42%, la mortalité hospitalière de 15,8% et 40,4% présentaient une mauvaise évolution à 6 mois. Le taux de MF n’était significativement pas plus élevé chez les patients présentant une ICR (15,9 [6,9 – 150] g/ml vs. 12,8 [6,23 – 94,5], p=0,49) (Fig. 1A). La courbe ROC montrait que les MF ne permettaient pas de prédire la survenue de l’ICR avec une AUC à 0,54 [0,42 – 0,66] (Fig. 1B). Le meilleur seuil de MF pour prédire l’ICR était de 148 µg/ml. A ce seuil, la sensibilité était de 28%, la spécificité de 88%, la valeur prédictive positive de 63 %, la valeur prédictive négative de 62% et le rapport de vraisemblance positif de 2,3. Les MF étaient en revanche significativement plus élevés chez les patients décédés durant l’hospitalisation (97,2 [36,0 – 147,0] µg/ml vs. 11,4 [5,7 – 73,0], p<0,01) et ceux ayant une mauvaise évolution à 6 mois (53,1 [8,3 – 150,0] µg/ml vs. 9,8 [5,4 – 58,5], p<0,01) (Fig. 2). Toutefois, après analyse multivariée, les MF n’étaient associés de manière indépendante à aucune des 3 variables (ICR : OR 2,27 [0,70 – 7,42] ; Mortalité hospitalière : OR 1,22 [0,11 – 9,99] ; Mauvaise évolution à 6 mois : OR 0,91 [0,23 – 3,68]) (Fig. 1C).
Conclusion
Notre étude ne montre pas d’association significative entre le taux de monomères de fibrine à l’admission et la survenue de l’ischémie cérébrale retardée. Les MF semblent cependant être un reflet de la gravité des patients et possiblement utile pour prédire une évolution neurologique défavorable ou discriminer les patients à faible risque de décès.
Auteurs
Pierre-Louis QUERE, Quentin MATHAIS, Mael DUFOUR, Hilaire DE MALLERAY, Tanguy LE NABOUR, Eric MEAUDRE, Pierre ESNAULT - (1)Hnia Sainte Anne, 83000-Toulon, France