Gestion de l'anémie en soins critiques : évaluation du taux d'application des recommandations éditées par la SFAR en 2019
Position du problème et objectif(s) de l’étude
L’anémie est fréquente chez les patients de réanimation et est associée à une morbi-mortalité accrue. Les RFE de la SFAR recommandent depuis 2019 l’administration d’EPO en cas d’hémoglobine (Hb) <12g/dL. L’objectif de cette étude est d’évaluer le taux d’application de cette recommandation dans notre service et le bénéfice clinique pour les patients.
Matériel et méthodes
Dans cette étude rétrospective, observationnelle et monocentrique, approuvée par le comité d’éthique local, nous avons inclus les patients adultes hospitalisés en réanimation entre 1/01/2022 et le 31/12/2023, pour une durée ≥3 jours, et ayant eu au moins un taux d’Hb <12g/dL. Nous avons comparé les patients traités par EPO (EPO+) ou non (EPO-) sur les critères suivants : taux de transfusion, Hb minimum (Hbmin) et maximum (Hbmax), Hb de sortie et mortalité hospitalière. Nous avons construit un modèle de régression logistique (estimé à l'aide des ML) pour prédire le décès ajusté sur l'âge, le sexe (H/F), l’IGSII, le motif d'admission (trauma/chirurgical/médical), le SEPSIS (O/N), la transfusion (O/N) et l’EPO (+ /-).
Résultats & Discussion
Parmi 871 patients admis sur la période donnée, 492 remplissaient les critères d’inclusion (304(62%) hommes, 59±17 ans, IGSII 43±17, 70% avec vasopresseurs, 77% ventilés mécaniquement) et 165(33,5%) ont reçus de l’EPO (en moyenne 1,06 injections). Les patients des deux groupes étaient comparables, mais les patients EPO+ étaient plus souvent traumatisés (43 vs 31%), avaient une durée de séjour plus longue et plus de sepsis . Les patients EPO+ avaient une Hbmin (7,54 vs 8,76 g/dL) et une Hbsortie plus basses (9,41 vs 9,82 g/dL), mais des taux de transfusion non différents. Les patients EPO+ avaient une mortalité plus basse (21 vs 38%, p=0,00016) (table 1). En analyse multivariée, l’âge (positive OR [95CI, 0,39 [0,14, 0,64], p= 0,002), l’IGSII (positive OR [95CI 0,05 [0.03, 0.06], p < 0,001), le sexe féminin (negative OR [95CI 0,62 [0.39, 0.97], p 0,04), la transfusion (positive OR [95CI, 0.64, [0.16, 1.12], p = 0.009) et l’EPO (negative OR [95CI, -0,85 [-1.36, -0.36], p < 0,001) étaient significativement associés à la mortalité (table 2).
Conclusion
Les recommandations sur l’EPO ne sont pas parfaitement appliquées dans notre service. L’EPO semble améliorer la survie. Toutefois ces résultats doivent être interprétés dans la limite d’une étude rétrospective, avec un potentiel biais de survie.
Auteurs
Margaux HOUGARD, Emmanuel RINEAU, Maeva CAMPFORT, Tristan PERRAULT, Sigismond LASOCKI - (1)Chu D'angers, Angers, France