Délai pour recueillir un consentement de participation à un essai clinique en réanimation : étude monocentrique rétrospective sur 6 ans
Position du problème et objectif(s) de l’étude
La recherche clinique nécessite un consentement éclairé du (de la) participant(e). En réanimation, il est possible d’utiliser les procédures d’urgence pour inclure des patients incapables de donner leur consentement préalable. Cependant, il est impératif de recueillir le consentement différé du patient dès que possible. Cette étude visait à évaluer le temps nécessaire pour obtenir le consentement éclairé définitif des patients inclus dans des Essai Clinique Randomisé (ECR) en réanimation.
Matériel et méthodes
Nous avons analysé rétrospectivement la manière et le temps nécessaire pour le recueil des consentements des proches et du patient lors de la participation à l’un des 14 ECR réalisés en réanimation au CHU de Nîmes de janvier 2018 à septembre 2024. Nous avons comparé différentes procédures d’obtention du consentement éclairé, comprenant le consentement du patient, de ses proches, et le consentement en procédure d’urgence immédiate avec recueil différé du consentement.
Résultats & Discussion
Sur les 9960 admissions en réanimation, 505 patients inclus dans 14 ECR ont été analysés. Le consentement éclairé avant inclusion a été obtenu chez 142 patients (28,1%), soit directement du patient (21%) soit par un de ses proches (7,1%). La procédure d’urgence a été utilisée chez les 363 patients restants (71,9%) avec obtention différée du consentement du patient chez 228 d’entre eux (45,1%). Cependant, pour 171 patients (33,9%) aucun consentement direct n’a pu être obtenu, pour cause de décès (21,6%), incapacité à consentir (4.2%), ou perte de contact (7.7%). Le temps médian pour obtenir le consentement différé du patient était de 12 jours après le consentement initial d’un proche. En cas de procédure d’urgence, il était de 5 jours, ou 20 jours si le consentement d’un proche était recueilli dans l’intervalle. Cette étude met en lumière la complexité du recueil du consentement éclairé pour les études de réanimation. Même si elle facilite l’inclusion de patients dans des situations critiques, la procédure d’urgence entraîne un délai non négligeable dans le recueil du consentement et une partie des patients ne peut plus consentir. Ces résultats soulignent l’importance d’un encadrement des pratiques de recherche, avec des protocoles bien établis, une équipe de recherche dédiée.
Conclusion
Le consentement éclairé a été obtenu avant l'inclusion chez 28,1 % des patients, tandis que des procédures d'urgence ont été utilisées pour 71,9 % d'entre eux. Le délai médian d'obtention d'un consentement différé dépendait de la procédure utilisée, variant de 4 à 19 jours. Environ 35 % des patients n'ont jamais donné leur consentement définitif. Ces résultats soulignent la nécessité d'optimiser les stratégies de consentement dans la recherche en réanimation afin de garantir le respect des normes éthiques et réglementaires et de faciliter la recherche respectueuse de l’intégrité du patient.
Auteurs
Benoit BARBIER, Fabien COISY, Loubna ELOTMANI, Jean-Yves LEFRANT, Nicolas BOULET, Philippe CUVILLON, Mircea SOFONEA - (1)Imagine, Ur-Um 107, University Of Montpellier, Division Of Anaesthesia Critical Care, Pain And Emergency Medicine, Nimes, France