Élimination du propofol dans les salles d’opérations
Position du problème et objectif(s) de l’étude
Le développement durable constitue aujourd’hui une préoccupation croissante en salle d’opération. Cependant, un écart persiste entre les recommandations environnementales et les pratiques cliniques réelles. Si la pollution et la toxicité associées aux gaz anesthésiques sont bien documentées, celles liées à l’utilisation et à l’élimination du propofol le sont beaucoup moins. Cette étude a pour objectif d’analyser les pratiques actuelles d’élimination des seringues de propofol par les équipes d’anesthésie.
Matériel et méthodes
Nous avons mené une enquête de pratiques observationnelle et par questionnaire, multicentrique, portant sur les modalités d’élimination des seringues de propofol au bloc opératoire dans 4 centres. L’enquête a été réalisée auprès des infirmiers anesthésistes (IADE) et des anesthésistes-réanimateurs. Nous avons quantifié les volumes de propofol jetés à la fin d’un programme chirurgical dans deux salles d’opération sélectionnées au hasard dans différents centres. Les critères d’analyse incluaient les méthodes d’élimination utilisées, la connaissance des risques environnementaux liés au propofol, ainsi que la familiarité des professionnels avec les protocoles d’élimination en vigueur dans leur établissement. Nous avons confronté ces pratiques déclarées aux techniques réellement mises en œuvre et à leurs coûts.
Résultats & Discussion
L’enquête a recueilli 118 réponses sur 197 professionnels sollicités, soit un taux de réponse de 59,9 %. Parmi les répondants, 40 (34 %) étaient anesthésistes-réanimateurs et 78 (66 %) IADE. Une large majorité (85 %) des participants reconnaissait la toxicité environnementale du propofol — 80 % des médecins et 88 % des IADE. Concernant l’élimination des seringues, 70 % (68/98) les jetaient comme déchets ménagers, mais seulement 50 % (59/118) déclaraient vider les seringues avant de les jeter. Par ailleurs, 68 % (80/118) affirmaient connaître les protocoles d’élimination des déchets de leur établissement, mais seuls 46 % (54/118) en connaissaient précisément les modalités, et 35 % (41/118) distinguaient clairement les procédures pour les déchets de soins dangereux (DASRI) et non dangereux.
L’évaluation sur le terrain a révélé un rejet quotidien de 19 000 mg de propofol pour 26 salles, soit environ 730 ml par jour et par bloc. Les coûts de traitement varient de 180 à 260 €/tonne pour les déchets ménagers, contre 600 à 1 700 €/tonne pour les DASRI, selon les établissements. Dans deux centres, les déchets ménagers et DASRI sont incinérés selon le même procédé, tandis que dans les deux autres, les DASRI subissent une neutralisation thermique à 100 °C avant enfouissement ou sont directement incinérés en fûts scellés.
Conclusion
Bien que la toxicité du propofol soit largement reconnue par les professionnels de santé, les modalités de son élimination restent mal connues et peu standardisées. Les équipes d’anesthésie ne disposent pas toujours des moyens nécessaires pour assurer une gestion sécurisée et écologiquement responsable de ce médicament.
Auteurs
Delphie DUPARC (1) , Elisabeth CHAPALAIN (2), Hafiani EL MAHDI (3), Olivier LANGERON (4), Anaïs CAILLARD (4) - (1)I.f.p.s. Brest C.h.u. La Cavale Blanche, Université Bretagne Occidentale, Brest, France, (2)I.f.p.s. Brest C.h.u La Cavale Blanche, Université Bretagne Occidentale, Brest, France, (3)Hôpital Privé D'antony, Ramsay Santé, Antony, France, (4)Département D'anesthésie Et De Soins Intensifs, C.h.u. La Cavale Blanche, Université Bretagne Occidentale, Brest, France