Stress perçu, résilience et qualité du sommeil chez les professionnels de l’anesthésie : une étude observationnelle et une analyse des profils de stress

Position du problème et objectif(s) de l’étude

Les professionnels de santé en anesthésie sont exposés à un stress professionnel important, susceptible d’altérer leur santé mentale et leurs performances. Cette étude vise à identifier les trajectoires de stress au travail sur un mois à l’aide de l’échelle visuelle analogique du stress (EVA stress) et à explorer les liens entre résilience, stress perçu et qualité du sommeil.

Matériel et méthodes

Une étude prospective observationnelle monocentrique a été menée auprès de professionnels de l’anesthésie (médecins et infirmiers anesthésistes en formation ou en exercice). Le protocole est enregistré sur ClinicalTrials.gov (NCT05392972) et a reçu un avis favorable du CERAR de la SFAR (IRB 00010254 - 2022 - 055). Chaque participant a évalué quotidiennement son stress au travail (début, pic et fin de poste) à l’aide d’une échelle visuelle analogique du stress (EVA stress) (0–10 cm), pendant un mois. La résilience a été mesurée au début du recueil à l'aide de l'échelle de Connor-Davidson (CD-RISC-10). Le stress perçu (Perceived Stress Scale, PSS-10) et la qualité du sommeil (Pittsburgh Sleep Quality Index, PSQI) ont été évalués en fin de période. Les trajectoires de stress ont été analysées par Dynamic Time Warping (DTW), suivie d’une classification ascendante hiérarchique (CAH), selon trois critères de variation des EVA stress : l'évolution intrajournalière du stress, l'impact de la journée précédente sur la journée suivante, et l'effet du pic de stress de la veille sur la prise de poste.

Résultats & Discussion

62 professionnels ont été inclus, totalisant 2801 EVA. La médiane de résilience (CDRISC10 = 27) suggère une résilience modérée, proche de celle rapportée dans d’autres populations soignantes. Elle était inversement corrélée au stress perçu (rho = –0,27 ; p = 0,02). Le stress perçu (PSS10) était corrélé aux EVA stress quotidiennes moyennes (rho = 0,31 ; p = 0,01) et à une moins bonne qualité de sommeil (PSQI ; rho = 0,41 ; p < 0,01). Les analyses EVA ont permis d’identifier : Deux profils selon l’évolution du stress au sein d’un même poste (stable vs décroissant), Trois profils selon la variation entre la fin d’un poste et le début du suivant (stress constant, récupération nette, stress globalement plus bas), Deux profils par rapport au pic de stress de la vacation précédente avec 2 niveaux de stress anticipatoire (un groupe plus marqué que l’autre) Ces profils doivent être interprétés avec prudence, compte tenu de la taille de l’échantillon et du caractère exploratoire de l’analyse et des différences modérées retrouvées.

Conclusion

La résilience semble jouer un rôle protecteur vis-à-vis du stress perçu, lequel est également corrélé à la qualité du sommeil. L’analyse des trajectoires de stress via EVA stress et DTW, selon différents axes temporels, pourrait permettre d’identifier des profils professionnels à risque et d’envisager des interventions ciblées. Ces résultats doivent cependant être interprétés avec prudence, en particulier concernant l’analyse des trajectoires, qui nécessite confirmation sur des échantillons plus larges.

Auteurs

Yoann ZAFIRIOU (1) , Jean Nöel EVAIN (2), Joris GIAI (3), Dimitri SOURD (3), Maïté LANCON (1), Delphine RIEUSSET (1), Amaelle TROUILLAS (1), Hugo TERRISSE (3), Pierre ALBALADEJO (2), Julien PICARD (2) - (1)Ecole Iade Chu Grenoble, Grenoble, France, (2)Cesar Chu Grenoble Alpes, Grenoble, France, (3)Chu Grenoble Alpes, Grenoble, France

Orateur(s)

Yoann ZAFIRIOU (Grenoble)