Évaluation des pratiques de ventilation sur mannequin au bloc opératoire lors du transfert des patients du bloc opératoire à la salle de surveillance postinterventionnelle.
Position du problème et objectif(s) de l’étude
Malgré l’utilisation de médicaments anesthésiques modernes facilitant l’extubation au bloc opératoire (BO), cette démarche reste variable en fonction des centres. Par conséquent, les patients doivent être ventilés durant le transfert entre le BO et la salle de surveillance post-interventionnelle (SSPI). Les modalités de cette ventilation lors du transfert ne font l’objet d’aucun consensus, en raison de l’absence de données spécifiques. L’objectif principal de cette étude est d’évaluer le pourcentage de volumes courants (Vt) appropriés délivrés pendant ce transfert, en conformité avec les principes de ventilation protectrice.
Matériel et méthodes
Dans cette étude de cohorte monocentrique, nous avons inclus les élèves infirmier en anesthésie (eIADE), les infirmiers en anesthésie (IADE), les internes en anesthésie (IAR) et les médecins anesthésistes (MAR) volontaires. Les volontaires ont ainsi suivi une séance de simulation in situ et ventilé un mannequin entre le respirateur d’une salle de BO jusqu’au respirateur de SSPI à l’aide d’un ballon souple muni d’une valve de Laerdal. Le dispositif Lusim® utilisé était un dispositif de simulation pulmonaire destiné à la formation à la ventilation mécanique in situ. Sa compliance dynamique est proche de celle de l’homme (69 ml/cmH20). Il était associé à une tête d’intubation dont la sonde était raccordée à LUSIM®. Le scenario portait sur un homme ventilé avec un volume courant (Vt) à 490 mL. Les Vt et les fréquences respiratoires étaient monitorées à l’aide du dispositif Eolife® en aveugle de l’opérateur. Les volontaires ont ensuite réalisé une auto-évaluation de la qualité de leur ventilation.
Résultats & Discussion
Parmi les 64 volontaires, 10 (15,6%) était eIADE, 30 (16,9%) IADE, 13 (20,3%) IAR et 11 (17,2%) MAR. Le sexe ratio femme/homme était de 1,6, 45 (70,3%) avaient moins de 5 ans d’expérience, 6 (20,3%) avaient plus de 20 ans d’expérience. Le délai moyen de ventilation pendant le transfert était de 5,5 min (sd 1,27). Seuls 17 (26,6%) volontaires avaient ventilés avec un Vt moyen entre 6 et 8ml/kg du poids idéal théorique, 36 (56.3%) ventilaient avec un Vt<6mL/kg. Parmi les 17 volontaire ventilant avec un Vt adapté, 6 (9,3%) ventilaient avec une FR comprise entre 10 et 20/minutes. Le sentiment d’efficacité était jugé comme acceptable par 24 (37,5%) volontaires, bon par 21 (32,8%) volontaires et insuffisant pour 18 (28,1%) volontaires. Le sentiment de sécurité était jugé comme acceptable par 29 (45,3%) volontaires, bon chez 21 (32,8%) volontaires et insuffisants chez 12 (18,8%) d’entre eux. Un sentiment d’efficacité n’était identifié chez 1 (1.6%) volontaire comme excellent. Pour le sentiment de sécurité, seuls 2 (3.1%) volontaires l’avaient exprimé.
Conclusion
Contrairement à ce qui est perçu par les volontaires, le Vt délivré lors de la ventilation au ballon était souvent inadapté, c’est-à-dire en moyenne non compris entre 6 et 8 ml/kg. La ventilation au ballon au repos n'était donc pas adaptée aux critères de la ventilation protectrice et ces difficultés semblaient amplifiées lors du transfert des patients du fait des interruptions de tache. Ainsi, il existe sans doute un intérêt à extuber les patients sur table d’intervention ou de les sortir du BO ventilés par un respirateur de transport. Une essai clinique portant sur l’intérêt d’un monitorage spirométrique d’une ventilation au ballon lors de la ventilation entre le BO et la SSPI pourrait avoir un intérêt pour les cas où l’extubation sur table est impossible.
Auteurs
Julia MARTIN, Emeline MARTINI, Catherine PARTY, Emma COURTOIS, Clément JARTOUX, David DI BERNARDO, Francis BERTHIER, Guillaume BESCH, Sébastien PILI FLOURY, David FERREIRA - (1)Département D’anesthésie-Réanimation Chirurgicale, Chru De Besançon, Besançon, France