17 septembre 2025
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Validité des capteurs de Mesure en Continu du Glucose (MCG) interstitiel en postopératoire de chirurgie cardiaque chez les patients diabétiques

Position du problème et objectif(s) de l’étude

En chirurgie cardiaque, le contrôle glycémique périopératoire permet de réduire la morbi-mortalité des patients qu’ils soient ou non diabétiques [1]. Les capteurs de mesure en continu du glucose (MCG) interstitiel permettent un meilleur contrôle glycémique des patients diabétiques ambulatoires et améliorent leur qualité de vie en diminuant les ponctions digitales [2]. Si la fiabilité de la MCG en périopératoire a été rapportée comme incertaine du fait de conditions physiopathologiques intercurrentes [3], les évolutions technologiques dont elle fait l’objet justifient une réévaluation régulière. L’objectif de ce travail était d’évaluer chez des patients diabétiques la précision des MCG comparée à la mesure de la glycémie artérielle et capillaire en postopératoire de chirurgie cardiaque.

Matériel et méthodes

Après approbation du comité d’éthique local (CER-BDX 2025-9), nous avons mené l’étude prospective observationnelle SUGAR (SUrveillance Glycémique en Anesthésie Réanimation) dans notre unité de réanimation cardiovasculaire (de novembre 2024 à nos jours). Les patients diabétiques insulino-dépendants majeurs porteurs d’un capteur de MCG et opérés d’une chirurgie cardiaque sous circulation extracorporelle ont été inclus. Selon notre protocole d’insulinothérapie, les patients pouvaient bénéficier d’une mesure régulière de glycémie artérielle (ART) et/ou capillaire (CAP). De façon concomitante, la valeur de MCG du capteur était relevée. Seule la valeur de glycémie ART ou CAP était prise en compte pour l’adaptation de l’insulinothérapie. Les mesures simultanées de glycémie (ART/MCG et CAP/MCG) ont été comparées via une méthode de Bland et Altman (biais moyen, précision et pourcentage d’erreur) et une analyse de corrélation. La mesure de référence était la mesure artérielle. Une valeur inexacte était définie arbitrairement par une différence >15%. Le pourcentage de déviation au protocole d’insulinothérapie, si la technique de mesure MCG ou CAP avait été utilisée à la place de la mesure de référence, a été déterminé.

Résultats & Discussion

Durant la période d’étude, 18 patients ayant une durée médiane de séjour en réanimation de 5 jours [3-8] ont été inclus. Une insulinothérapie intra-veineuse continue a été utilisée chez 89% d’entre eux et 61% ont reçu de la noradrénaline durant leur séjour. Au total, 158 couples de mesure ART/MCG et 87 couples de mesure ART/CAP ont été analysés. Le biais moyen ART/MCG et ART/CAP était respectivement de 0,10±0,23 g/L et de -0,07±0,22 g/L. Le pourcentage d’erreur pour ART/MCG et ART/CAP était respectivement de 12% et 10%. Le pourcentage de mesure inexactes était identique dans les deux modes de mesures à savoir de 24%. Une très bonne corrélation entre les méthodes de mesure MCG et CAP et la méthode de référence (ART) a été observée (figure 1). Le pourcentage de déviation au protocole, si la MCG et CAP avaient été utilisés, était respectivement de 42% (déviation de 1,20±0,47 UI/h d’insuline) et de 38% (déviation de 1,09±0,29 UI/h d’insuline).

Conclusion

Malgré une très bonne corrélation entre la mesure de référence et les mesures alternatives (MCG et CAP), la MCG interstitielle a tendance à sous-estimer la valeur de glycémie tandis que la mesure CAP la sur-estime. Ces divergences sont associées à une déviation de protocole dans près de 40% des cas. Nos résultats soulignent la nécessité de poursuivre l’évolution technologique de la MCG avant son déploiement dans la pratique quotidienne en soins critiques.

Auteurs

Lucas MARTIN, Claire ODDOS, Étienne CLÉQUIN, Chloé MASSOL, Laura PRIVÉ, Delphine BEAUGRAND, Julien IMBAULT, Antoine BEURTON, Alexandre OUATTARA - (1)Service D'anesthésie-Réanimation Cardivasculaire, Chu Bordeaux, Bordeaux, France

Orateur(s)

Lucas MARTIN  (Bordeaux)